Logo1X

NOTES DE LECTURES

Bréonaz juin 2011

CARL HEMPEL 2004 (2ème éd.).
Eléments d’épistémologie. Paris : Armand Colin (Cursus)

Une initiation aux thèmes principaux de l’épistémologie telle qu’elle est conçue dans la tradition de l’école de Vienne. On retiendra ici de ce livre le chapitre 7 consacré à la formation des concepts.

POSITION DE CARL HEMPEL

Il existe trois type de définitions : les définitions descriptives, les définitions stipulatives et les définitions opératoires.

1. Définition descriptive :

A (definiendum) a la même définition de B (definiens)

Par ex. : « père a la même signification que parent mâle »

De telles définitions analytiques ont pour but d’analyser la signification admise d’un terme et de le décrire à l’aide d’autres termes dont la signification doit être comprise si l’on veut que la définition fasse l’affaire. Elles spécifient l’étendue des applications ou extension. On peut les dire plus ou moins exactes et même vraies ou fausses.

2. Définition stipulative :

On donnera à A la même définition qu’à B

Par ex. : «densité est l’abréviation de masse en grammes par centimètre cube ».

Il peut sembler qu’idéalement chaque terme utilisé dans une théorie scientifique devrait être défini avec précision. Mais c’est là une impossibilité logique ; car, après avoir formulé une définition pour un terme, nous aurions ensuite à définir à leur tour chacun des termes utilisés pour définir ces derniers et ainsi de suite, en évitant les « cercles », c’est-à-dire définir un terme à l’aide de certains de ceux qui précèdent dans la chaîne. Dans toute théorie scientifique il existe donc une série de termes que l’on appelle primitifs ou préthéoriques qui ne reçoivent aucune définition à l’intérieur du système.

3. Définition opératoire :

Selon les travaux du physicien P. W. Bridgman la signification de chaque terme scientifique doit pouvoir être déterminée en spécifiant une opération de vérification bien définie qui lui fournit un critère d’application. De tels critères sont souvent appelés définitions opératoires. Le but des définitions opératoires est d’assurer la testabilité objective de tous les énoncés scientifiques. Un terme scientifique doit ainsi permette de dériver des implications vérifiables sans équivoque à partir des hypothèses où ces termes figurent.

Par exemple une version opérationaliste explicite de la définition de l’aimant pourrait être :

« Un aimant peut être une barre de fer ou d’acier qui attire à ses extrémités des grains de limaille de fer ». Mais il peut être également autrechose.

Ou, autrement formulé :

« Si des grains de limaille de fer sont attirés par les extrémités d’une barre de fer ou d’acier, alors cette barre est un aimant ».

RELATIONS AVEC LE LOGICISME

Quelles relations établir entre ces trois types de définitions et le logicisme ?

Question 1. Comment articuler la réflexion de Hempel sur la formulation des concepts et la façon dont le logicisme présente les démonstrations sous forme de schématisations ?

La question de la formation des concepts nous semble s’organiser selon un axe perpendiculaire aux chaînages des démonstrations du logicisme et constituer un aspect complémentaire, indispensable, des démonstrations, une question en effet peu abordée par le logicisme. Cette question touche à la fois les définitions descriptives et les définitions stipulatives.

Question 2. L’analogie que l’on constate entre les définitions dites opératoires et les formulations dites de transfert d’attribut du logicisme révèle-t-elle une situation épistémologique identique ?

La définition opératoire peut prendre une forme si Pi alors Pi+1 comparable à celle introduite par le logicisme (cf. ci-dessus). Cette définition permet de tester la pertinence d’une définition descriptive sur la réalité.

D’où cette question :

La définition opératoire : « Si des grains de limaille de fer sont attirés par les extrémités d’une barre de fer ou d’acier, alors cette barre est un aimant ».

Est-elle formellement identique au transfert d’attribut :

« Si j’observe un gros oiseau sur une main gantée alors il s’agit d’un faucon »

ou autrement formulé :

« Un faucon peut être un gros oiseau sur une main gantée » ? Mais il peut être également autrechose.

Ces formulations permettent effectivement de procéder à des tests de validation ou d’invalidation sur des corpus de références divers, une situation qui renforce l’analogie constatée entre définition opératoire et logique du transfert d’attribut.

Question 3. La nécessité d’introduire des préconcepts sans définition (termes primitifs) à l’origine des chaînes de définitions des concepts (définitions descriptives) se retrouve-t-elle dans les chaînes d’inférence du logicisme ?

Nous écrivions : Les relations entre Oj et Aj du domaine de référence permettant l’interprétation d’un vestige ont été formulées de façon identique par référence à un troisième ensemble de faits. Il s’agit ici aussi d’un savoir construit et dans une certaine mesure contestable. Les domaines de référence forment donc des chaînes aux multiples maillons dont la structure est probablement extrêmement complexe et souvent très mal connue. Seuls certains segments, minuscules, en sont maîtrisés.

ChaîneX

Fig. Organisation des savoirs interprétatifs sous forme de chaînes de rétrodictions potentielles. L’interprétation de Oi nécessite l’établissement d’un référentiel Oj1 (propriété) -Aj1 (attribut). Mais ce dernier peut reposer lui-même sur un référentiel Oj2-Aj2. La chaîne peut ainsi être généralisée sans limites autres que celles imposées l’organisation pratique d’une recherche.

Il existe donc une certaine analogie entre le chaînage des définitions descriptives et le chaînage des corpus de références.

Constate-t-on, dans ce deuxième cas, les mêmes limites ?

1. Première analogie forte :

Dans les deux cas, la cohérence logique veut que l’on évite les cercles vicieux : Dans le jeu des définitions, quand on tente de définir chacun des termes d’un système donné, il convient de ne jamais utiliser un terme dans un definiens qui ait été défini plus haut dans la chaîne. Dans le chaînage des transferts d’attribut, il conviendrait de même d’éviter ce type de retour en arrière.

2. Seconde analogie faible

La première analogie implique également que le chaînage des transferts d’attributs ne peut se déployer à l’infini, mais les causes de cette limitations ne sont pas les mêmes. Dans les sciences humaines, le transfert d’attribut est en effet fondé sur des connaissances culturelles et/ou historiques. Or nous vivons dans un monde fini, tant sur le plan chronologique que géographique. Les chaînes de comparaisons ne peuvent donc se développer à l'infini.

 

Hempelx